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Fonction publique : Une année blanche en 2024 est inconcevable

De la surdité et des attaques statutaires tous azimuts : voilà à quoi font face les 5,7 millions d’agents de la fonction publique en matière de salaires et de rémunérations. Cela alors qu’il y a urgence à appliquer une revalorisation générale des traitements indiciaires.



Aucune réponse aux agents publics sur une hausse des salaires en 2024…, Le ministre de la Transformation et de la Fonction publiques communique en revanche abondamment sur d’autres axes qu’il compte suivre. Stanislas Guérini communique ainsi sur sa volonté d’organiser des NAO (négociations annuelles obligatoires) sur les salaires dans la fonction publique. Elles seraient annuelles — pour négocier un « paquet salarial », soit tout ce qui se situe autour du salaire —, ainsi que triennales. L’on discuterait alors du fond, notamment de la grille précise Christian Grolier, secrétaire général de FO-Fonction publique.

Le ministre, dans une lettre adressée le 13 octobre aux organisations syndicales, prend le soin toutefois de préciser que les mesures qui seraient décidées dans le cadre des NAO annuelles le seraient après partage de l’ensemble des facteurs économiques, sociaux et budgétaires nécessaires. Cela conduit Christian Grolier à rappeler une réalité… Il n’y a aucune obligation pour l’employeur public de négocier les salaires. Par ailleurs, On négocierait les salaires alors que le projet de loi de finances (PLF) passe au parlement ? Quand on voit le PLF 2024 : il n’y a pas un euro de prévu pour l’amélioration des rémunérations ! Et si le ministre porte notre demande salariale, négociée, devant le parlement, et se fait retoquer, que se passe-t-il ?.


Pour FO, l’urgence d’un rattrapage de la valeur du point à hauteur de 10%


Les NAO réuniraient donc, une fois l’an, en début de semestre, les employeurs publics (dont les employeurs territoriaux, lesquels qui ont voté contre la dernière hausse des salaires, 1,5%, en juillet dernier), les syndicats et le gouvernement, propose le ministre. Le 17 octobre, alors qu’il lançait les réunions — jusqu’en novembre — pour des négociations sur les carrières et rémunérations — sans pour autant préciser ce qui serait mis ou pas à la négociation, souligne FO Fonction publique — Stanislas Guérini comptait obtenir des syndicats un « accord de méthode » pour cette négociation.


Pour rappel, la notion de « négociation collective » a fait son entrée dans la fonction publique via l’ordonnance du 17 février 2021, laquelle consacre les accords majoritaires. Mais à cette réunion, les huit organisations lui ont demandé, elles, ce que le ministre comptait faire pour 2024 en matière salariale, le ramenant ainsi à ce qui est l’urgence pour les agents : la hausse des salaires, dont par un rattrapage. Constatant l’absence de réponse du ministre, lequel a indiqué ne pas avoir de « mandat » sur le sujet, les huit ont alors demandé l’ajournement de la réunion. Il est inacceptable de concevoir une année blanche en 2024, ont-elles souligné. L’Union interfédérale FO Fonction publique demande quant à elle un rattrapage immédiat de 10% sur la valeur du point d’indice (revalorisé de 1,5% seulement en juillet dernier) et rappelle que la perte de pouvoir d’achat sur la valeur du point est de 27,5% depuis 2000.


La triste mine du salaire indiciaire

A travers une étude publiée le 25 octobre, l’Insee qui indique que les salaires du public ont progressé deux fois moins vite que ceux du privé entre 2011 et 2021, met surtout la lumière sur le phénomène devenu récurent : le caractère atone, voir nul, des revalorisations du traitement indiciaire. Car si l’étude évoque le « salaire net moyen en équivalent temps plein », en progression de 2,1% en euros constants dans la fonction publique sur cette période de dix ans, soit « +0,2% en moyenne chaque année précise l’Insee, cette étude rappelle dans sa documentation quelques paramètres nécessaires au décryptage… Ainsi, le terme de « salaire » comprend le salaire de base (ou traitement indiciaire dans la fonction publique) mais aussi les primes, la rémunération des heures supplémentaires ou complémentaires effectuées, l’épargne salariale (intéressement, participation, abondement), d’autres indemnités et rémunérations annexes (indemnité de résidence, supplément familial, etc.) et les avantages en nature. Dès lors, la hausse annuelle de 0,2% du salaire net moyen — après une légère baisse dans la décennie 2010 précise l’Insee — est à mettre en perspective. D’autant sachant que dans la fonction publique, la part des primes et indemnités pèse autour de 30% dans le salaire brut global, voire davantage. Par ailleurs, depuis 2020, la hausse du salaire a été enregistrée notamment dans la fonction publique hospitalière, à la faveur des primes exceptionnelles versées durant la crise sanitaire puis des mesures de revalorisations prises dans le cadre des accords du Ségur de la Santé.

Cependant, même en considérant le salaire, dans sa globalité donc, l’Insee remarque que celui-ci a reculé en dix ans (sur l’ensemble des versants, de 1,1% pour les personnels de la catégorie A, de 0,2% pour ceux de la catégorie B. Quant à l’augmentation de 4,4% concernant les agents de catégorie C, elle a à voir avec les quelques mais insuffisantes mesures décidées sur la grille ces dernières années, ce qui n’empêche pas toutefois les traitements indiciaires de cette catégorie de se retrouver régulièrement sous le niveau du Smic à chacune de ses revalorisations. Le maintien encore cette année du dispositif Gipa, (l’indemnité de garantie du pouvoir d’achat, créée en 2008 et calculé sur le traitement indiciaire brut) appliqué à des milliers d’agents, dont de catégorie C, montre aussi à lui seul la perte de pouvoir d’achat du salaire indiciaire, non relevé à hauteur de l’inflation. Par ailleurs, la hausse du salaire net moyen au sein de la catégorie C a à voir avec le fait que le versant hospitalier compte plus de 48% d’agents de cette catégorie.

Ces réalités salariales difficiles pour les agents (5,7 millions sur les trois versants), le ministère feint de les ignorer, communiquant plutôt sur ses projets de réforme. Début septembre, le ministre a ainsi confirmé dans les médias l’arrivée d’une réforme de la fonction publique, via un prochain projet de loi qu’il aimerait présenter d’ici la fin de l’année. L’accent serait mis sur le mérite, notamment par les primes, l’intéressement, ce qui induirait une individualisation plus marquée encore du salaire. Et ce qui serait une nouvelle attaque contre le statut et la notion de carrière. Il faut des méritants et des engagés, rémunérer davantage l’agent qui aura fait plus, qui aura fait mieux déclarait Stanislas Guérini estimant que « le statut, ça ne peut pas être le statu quo ». Le 26 octobre Stanislas Guérini organisait une nouvelle réunion le 26 octobre, mais cette fois à propos d’un accord de méthode à établir concernant l’agenda social 2024…, lequel contient des rendez-vous sur les rémunérations ! Il n’y a pas de réponse sur les salaires, mais une volonté de faire co-construire l’agenda social par les organisations syndicales, réagissait Christian Grolier.


Journaliste à L’inFO militante

 

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